Chrono-
Thérapie

L’invisible contrôle le visible

Les peurs, leurs origines et leurs implications

Mais d’où viennent ces peurs ? Si elles semblent naturelles dans certains contextes (peur de la mort, peur de l’inconnu), elles sont souvent exacerbées par des contraintes imposées par notre environnement social, familial ou culturel.

Les contraintes comme catalyseurs de peur

Les contraintes, ces pressions que nous ressentons pour nous conformer à des attentes, sont souvent à l’origine de ces peurs. Elles peuvent prendre des formes variées :

• Professionnelles : La peur de ne pas réussir, de perdre son emploi ou de ne pas atteindre les objectifs fixés.
• Sociales : Le besoin d’être accepté, respecté ou conforme aux normes sociales.
• Personnelles : Le désir de répondre à des attentes familiales ou de correspondre à une image idéale.

Ces contraintes, elles-mêmes, ne surgissent pas de nulle part. Elles naissent souvent de nos ambitions : ce que nous voulons faire, avoir ou être. Et ici se pose une question fondamentale : ces ambitions sont-elles vraiment les nôtres ? Ambitions personnelles ou imposées ?

Dans bien des cas, les ambitions qui nous poussent à agir ne sont pas purement individuelles. Elles peuvent être :

• Héritées de nos parents : Vouloir réaliser les rêves qu’ils n’ont pas pu accomplir, ou répondre à leurs attentes implicites.
• Imposées par la société : La quête d’un statut, d’une richesse ou d’une image idéale.
• Façonnées par la culture : Suivre des modèles de réussite ou de bonheur dictés par des médias, des traditions ou des croyances collectives.

Cette dynamique crée un cercle vicieux : des ambitions imposées engendrent des contraintes, qui elles-mêmes génèrent des peurs. Ces peurs, si elles ne sont pas reconnues et traitées, peuvent alors se traduire en maladies physiques ou mentales.

Soigner une maladie : où commencer ?

Prenons l’exemple du cancer, une maladie complexe aux causes multiples. Si l’on reconnaît que des peurs profondément enracinées peuvent contribuer à son développement, cela pose une question cruciale : où doit-on intervenir pour soigner efficacement ?

1. Traiter les peurs
   Les peurs peuvent être abordées par des thérapies émotionnelles ou psychologiques:
• Des pratiques comme la méditation ou la pleine conscience aident à réduire l’impact du stress et de la peur sur le corps.
• Des approches comme l’EMDR ou la thérapie somatique permettent de traiter des traumatismes anciens.
2. Alléger les contraintes
   Identifier et réduire les pressions externes qui alimentent ces peurs est essentiel. Cela pourrait inclure :
• Une réorientation professionnelle pour diminuer le stress.
• Une rupture avec des normes sociales ou familiales qui génèrent un sentiment d’échec.
3. Revoir les ambitions
   Il est tout aussi important de différencier les ambitions personnelles des ambitions imposées. Cela implique un travail de réflexion profonde pour :
• Réaligner ses objectifs avec ses propres valeurs et désirs.
• Abandonner les attentes irréalistes ou non désirées qui pèsent sur l’individu.
4. Changer les éducateurs et la société
   Enfin, pour un changement durable, il est nécessaire de réformer les systèmes qui alimentent ces cycles de peur et de contrainte. Cela pourrait inclure :
• Une éducation plus axée sur le développement personnel et la gestion des émotions.
• Des politiques sociales qui valorisent le bien-être plutôt que la performance.
• Une culture collective qui encourage l’authenticité et la diversité des parcours de vie.

Une médecine centrée sur la personne

Soigner une maladie ne peut se limiter à traiter les symptômes ou les causes biologiques immédiates. Il s’agit de comprendre les trajectoires profondes qui ont conduit à son apparition, en remontant aux peurs, aux contraintes, aux ambitions et aux influences externes qui les ont façonnées.

Dans ce contexte, le rôle du médecin évolue, il devient non seulement un soignant, mais aussi un guide, capable d’accompagner le patient dans une exploration de son histoire personnelle et de ses conditionnements. Une approche holistique qui réintègre le physique, l’émotionnel, le social et le spirituel pourrait alors ouvrir la voie à une santé véritablement durable et globale.

La question n’est pas seulement de savoir quoi traiter, mais qui aider à se retrouver. Les maladies, à leur manière, nous rappellent souvent que nos trajectoires ne sont pas alignées avec notre essence profonde. Et la guérison commence là : dans un retour à soi, libéré des peurs, des contraintes et des ambitions qui ne nous appartiennent pas vraiment.

Docteur Jean-Pierre Jubin